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plantation au Chili puis créé son entreprise,
avant que sa femme calédonienne ne
l’entraîne sur le Caillou, où il a d’abord
travaillé neuf ans comme directeur
commercial des Bois du Pacifique.
L’homme débauché par la Saem sait donc
à la fois gérer la ressource et ce que les
clients attendent. Un atout quand il s’agit
de créer une activité économique durable.
«
95 % du bois utilisé en Nouvelle-
Calédonie est importé, soit 18 000 m
3
. À
terme, le but est de produire lamoitié de
ce qui sera consommé,
prévoit-il.
Le bois
local alimente 5 % des constructions en
bois, si on montait à 10 % ce serait déjà
énorme.
»
75 %
D
’
ESPÈCES ENDÉMIQUES
Produire. Mais quoi ? Sud Forêt plante
kaori, pin colonnaire, faux tamanou,
santal, gaïac… des espèces endémiques
qui représentent 75 % des plantations.
Pour la construction, c’est le pin des
Caraïbes, ou
pinus
, qui est privilégié. Une
espèce dite invasive qui n’a pas bonne
presse dans les milieux écologistes, mais
«
justement parce qu’elle n’a pas été
gérée
», intervient le forestier, qui entend
bien «
remonter l’image du pinus
»
grâce à la gestion sylvicole, les éclaircies
pratiquées – qui sont dorénavant valorisées
par la vente de bois sur pied – permettant
à d’autres espèces de se développer. Car
cette essence a une croissance rapide – 30
ans, contre le double pour le pin colonnaire
ou plus de 100 ans pour le kaori – et
elle dispose de «
bonnes propriétés
mécaniques
», qui en font un bois résistant
et qui peut être «
traité à cœur
».
Les graines, qui proviennent d’arbres
semenciers, sont récoltées et livrées aux
pépiniéristes sous-traitants, au nombre de
douze, répartis en province Sud. Sud Forêt
leur rachète ensuite les plants, prépare les
sols puis plante et entretient. Les coupes
alimentent trois scieries : Mathieu à
Sarraméa, BMNS à Farino et la Maison du
rondin à Bourail.
S
TABILISER
LA RESSOURCE
«
L’idée est de créer une ressource
constante,
expose Ricardo Pinilla-
Rodriguez.
Une fois la ressource
stabilisée, on pourra faire monter en
puissance les scieurs.
» Actuellement,
la production annuelle de bois de sciage
ne dépasse pas 2 000 m
3
. Sur ce volume,
1 500 m
3
vont à la production de palettes
et 500 m
3
aux particuliers. L’absence de
norme limite encore l’accès aux chantiers
de construction. Un dossier en cours avec
l’Erpa et le Cirad (Centre de coopération
internationale en recherche agronomique).
Sud Forêt s’est également inscrit dans
la démarche Iso 14001, une norme qui
atteste de la capacité d’une entreprise à
maîtriser les impacts environnementaux
de son activité – l’audit est prévu en 2017.
Et vise les certifications FSC et PEFC,
qui garantissent une gestion durable des
forêts. Le but est de «
vendre notre bois
de manière compétitive
», un «
gage sur
l’avenir
». Nicole Andrea-Song souligne
l’effet d’entraînement : «
Gagner des
parts de marché dans la construction
locale aurait un effet positif sur l’emploi,
l’environnement, le contrôle de l’érosion
des sols, la protection de l’eau, de la
biodiversité…
»
L
ES PRIVÉS DANS
LA BOUCLE
Surtout, Sud Forêt veut réveiller l’intérêt
pour le bois, présenté comme un
relais de croissance, en proposant aux
propriétaires privés, y compris les GDPL,
de planter des parcelles sur des terrains
non exploités. «
C’est un investissement
à long terme. Sud Forêt s’occuperait
de tout. Par exemple le santal, qui
pousse vite et est très lucratif, est un
bon placement.
» Une manière d’étendre
les boisements en diversifiant les sources
d’approvisionnement pour mieux couvrir
les besoins, locaux puis à l’export.
L’idée est aussi de rentabiliser aumaximum
les périmètres de boisement – dont la bonne
gestion veut que 30 % seulement soient
plantés – en proposant d’y développer par
exemple des programmes de recherche.
Car outre les surfaces à planter, l’autre nerf
de la guerre, c’est l’argent. D’où l’idée de
créer un Fonds d’investissement forestier,
«
à condition qu’il soit accompagné de
mesures fiscales incitatives
».
La question qui taraude est la vision « pays
» d’un tel projet, alors que la province
Nord nourrit elle-même un programme
d’exploitation du massif forestier du
plateau de Tango. «
On est en contact
avec la province Nord,
répond Ricardo
Pinilla-Rodriguez
. Il nous faut développer
des synergies.
»
VIS
ITE
VIS
ITE
Fiche d’identité
>
Sud Forêt est une Société
anonyme d’économie mixte
(Saem) au capital de 810
millions de francs (dont
apports en nature), créée en
juin 2012 sous l’impulsion de
la province Sud, alors présidée
par Pierre Frogier.
>
Actionnaires :
la province
Sud (et ses 1 060 ha de
surfaces boisées), PromoSud
(bras financier de la province)
et la Caisse des dépôts et
consignations.
>
Présidente :
Nicole Andrea-
Song, élue LR à la province
Sud et au Congrès.
>
Directeur général :
Ricardo
Pinilla-Rodriguez, ingénieur
forestier, MBA, ancien
directeur commercial des Bois
du Pacifique.
>
Effectif :
14 personnes.
Emplois directs (sous-
traitance) et induits : 170.
>
Siège social :
Port-Laguerre.
Nicole Andrea-Song, présidente.