LE THÉÂTRE FORUM
Inventé dans les années 60 par le dramaturge et
metteur en scène brésilien Augusto Boal, fondateur du
« théâtre de l’opprimé », le théâtre forum soulève des
problèmes de société et invite la communauté où il est
joué à intervenir pour infléchir le cours des événements.
Depuis une quinzaine d’années, la compagnie d’Isabelle
de Haas met le théâtre forum « au service de la
prévention, de la réflexion et de la proximité ».
à l’extérieur du cercle d’entrer – les corps se touchent, on
prend conscience du groupe. Ou improviser une réaction
quand Jeanne joue celle qui se trompe de salle – un grand
gaillard la rattrape et l’invite à nous rejoindre. Chacun doit
aussi dire haut et fort son prénom tout en désignant de
la main un des participants qui, à son tour, se nomme en
pointant quelqu’un d’autre – exercice assez perturbant
qui génère quelques rires… Empathie, mise en confiance.
Puis chacun doit dire une phrase qui lui passe par la
tête et Jeanne propose de la répéter sur différents tons,
triste, affamé, enfantin, joyeux… Pas facile de dépasser sa
timidité, la gêne, mais on est déjà tous dans le même bateau.
Le groupe peut passer à l’étape suivante. Mise en situation.
À l’entrée d’un concert, différents personnages joués
successivement par Jeanne se présentent sans ticket et
tentent de convaincre le vigile de les laisser passer. Chaque
participant y passe et doit adopter l’attitude qui convient.
Après chaque scène, le groupe commente, critique ou
approuve, et le formateur est là – lui n’est pas comédien
– pour corriger, souligner les erreurs ou au contraire les
bons gestes, donner des éléments de langage adaptés, etc.
L’apprentissage se fait par un effet miroir, la répétition,
la prise de conscience. D’autres scènes sont jouées avec
Jeanne puis en duo, chacun à tour de rôle, vigile ou client.
«
Ç
A
LIBÈRE
DES
CHOSES
»
Cette démarche participative permet d’incarner des
situations très concrètes, de les vivre en groupe, de les
ressentir et donc de mieux intégrer les préceptes de la
formation. Dans ces moments, illustre Isabelle, «
on est
“mis en danger” et tout le monde y passe, les gens rient,
se parlent, ça libère des choses, ça met en confiance
».
Les séances peuvent durer «
deux heures, une journée,
plusieurs ateliers… L’entreprise nous contacte, on
écoute les besoins, on étudie les objectifs, le public, et
on fait une proposition, très variable en fonction du
temps, du budget… On s’adapte.
»
Avant l’intervention, un gros travail de préparation
est mené. Le ou les comédiens doivent s’imprégner du
secteur d’activité, des conditions d’exercice du métier, du
vécu des salariés… Un exercice d’imprégnation dont ces
professionnels du théâtre sont familiers, et qui leur permet
ensuite d’enrichir leur propre répertoire. «
On découvre
des tranches de vie, on est nourri par cette vie de
terrain.
» Dans le monde de l’entreprise, on parlerait d’un
échange « gagnant-gagnant ».