AGRI
CULTURE
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CULTURE
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S’aligner sur l’UE
Une commission végétale élargie
s’est réunie à la Chambre d’agri-
culture en août et a, entre autres
questions, abordé celle des se-
mences «
IT
». En substance, la
Nouvelle-Calédonie n’ayant pas
le niveau d’expertise suffisant,
contrairement à l’Union euro-
péenne, la commission est favo-
rable à un alignement sur la légis-
lation européenne, comme pour les
produits phytosanitaires.
La loi des semenciers
Beaucoup de maladies du maïs
sont absentes en Calédonie. Il y a
donc ici des exigences lourdes à
l’import en termes de biosécurité,
mais aussi peu de volumes compte
tenu de la taille du marché. Diffi-
cile donc de dicter nos exigences
aux semenciers australiens ou néo-
zélandais. Les normes sanitaires
remplies, les semenciers posent
leurs conditions. IT ou pas, selon
la disponibilité.
Fabriquer nos propres
semences ?
À la Chambre d’agriculture, Clé-
ment Gandet, directeur tech-
nique, explique : «
L’Adecal tra-
vaille sur les semences. Des
essais sont faits, en quantités
réduites, sur le riz et le soja. À
grande échelle, il faut des instal-
lations, des laboratoires, ce sont
des investissements très lourds.
Puis ça nécessite des silos spé-
cifiques pour chaque semence,
et des champs semenciers avec
des protocoles très stricts. Il y a
beaucoup de contraintes. Vu
le coût que ça représente, cela
relève d’une décision politique.
La question qui se pose est : a-t-
on les moyens en Nouvelle-Calé-
donie de faire autrement que le
reste du monde ?
»
REPÈRES
Gérard Pasco, président de la
Chambre d’agriculture
comme ça ! La PAC 606, c’est une variété
qu’on travaille depuis longtemps et on
veut la conserver. Alors, non seulement on
allait retarder les plantations de trois mois
en attendant la commande de nouvelles
graines, mais en plus on aurait planté
une variété qu’on ne connaissait pas ! Je
fais donc partie de ceux qui ont refusé
l’échange. Il n’y avait aucune raison de
nous demander d’échanger une semence
autorisée, hormis pour rassurer certains
fonctionnaires. Ça, ce n’est pas notre
problème. Les services administratifs sont
quand même capables de se défendre, ils
ont des ingénieurs, des techniciens qui
peuvent répondre à toutes les attaques.
Mais non, on nous demandait de faire ce
sacrifice-là. J’ai répondu fermement non.
Et là, quelque chose de bizarre s’est passé,
les Stop OGM ont soi-disant appris dans
un rapport au Sénat que des semences
IT étaient entrées sur le territoire. Mais
quand on prend le rapport du Sénat, qu’est-
ce qu’on lit ? M. Mademba-Sy, conseiller
agriculture au gouvernement, dit que ce
n’est pas tant l’IT qui pose problèmemais le
fait qu’il soit livré avec un herbicide qui peut
développer des résistances, etc. Mais l’IT,
ce n’est pas un kit. La preuve, c’est qu’on a
reçu les ITmais l’herbicide, on ne l’a pas. En
fait, le seul herbicide qui a été commandé,
c’est pour faire un essai à Pouembout, et
c’est l’Adecal, un organisme public, qui l’a
commandé.
Le vice, c’est de faire l’amalgame entre la
transgenèse, qui est le vrai OGM et qui
est interdit, et la mutagenèse, où on ne
transforme pas la plante, on développe une
qualité. Et les responsables politiques aussi
ont fait l’amalgame puisqu’ils ont déclaré
que c’était des OGM déguisés. C’est grave.
L
E GOUVERNEMENT A EMBOÎTÉ LE PAS À
S
TOP
OGM
ET
ANNONCÉ
DES
CONSULTATIONS
VISANT À ÉLARGIR
L
’
INTERDICTION DES
OGM
AUX PRODUITS
ISSUS DE LA MUTAGENÈSE
. A
VEZ
-
VOUS
PAR AILLEURS REÇU
SON
SOUTIEN
?
Rien, rien, rien, aussi bien gouvernement
que province. On s’est retrouvés tout
seuls. Ça fait mal. Et l’interdiction totale
annoncée, c’est une aberration. Le
gouvernement a annoncé qu’il allait aligner
sa politique phytosanitaire sur la France,
sur l’Europe. Et puis les IT, on veut les
interdire ? Mais en vertu de quoi ? Si ça se
passe, nous déposerons un recours.
C
ERTAINS
RÉCLAMENT
LE
DÉVELOPPEMENT
D
’
UNE
FILIÈRE
LOCALE
DE
PRODUCTION
DE
SEMENCES
,
QUI
NOUS METTRAIT
À
L
’
ABRI
DE
GRAINES CONTESTÉES
. Q
U
’
EN
PENSEZ
-
VOUS
?
C’est aberrant. Les semenciers, ils font ça
à grande échelle, si on faisait les semences
de maïs, les hybrides, pour 40 tonnes, mais
ça coûterait combien le kilo de semences ?
On n’a pas les organisations, le personnel,
les semences de base…Techniquement et
économiquement, c’est impensable.
C
OMBIEN
LA
FILIÈRE
VA
-
T
-
ELLE
PRODUIRE
CETTE ANNÉE
?
On devrait dépasser les 7 000 tonnes.
C’est la seule filière du monde rural en
augmentation. On parle d’autosuffisance
alimentaire, et c’est celle qu’on veut démolir !
Moi je fais ça parce que c’est ma passion.
À mon âge – j’ai 77 ans – je pourrais
arrêter. Mais je ne le fais pas parce que j’ai
mes petits-enfants qui suivent derrière.
L’agriculture, c’est pas facile. On veut être
respectés.
*
ORS :
Organisme de récolte et de stockage, qui
gère les silos où le maïs est stocké puis vendu
aux provendiers (alimentation animale).
«
Qu’est-ce qu’on fait ? On
va dire on arrête le maïs ?
Aujourd’hui qu’on parle
d’autosuffisance alimentaire,
je trouve que sur la partie cé-
réales, les gens se sont mobili-
sés. On est à 7 000 et quelques
tonnes de maïs, et il en faut
10 000 pour la consommation
locale, pour nourrir les ani-
maux, les cochons, les poules,
etc., donc pour cette filière au
moins, on n’est pas très loin
du but. Et il faudrait penser
aux autres céréales. Est-ce
qu’on contrôle ce blé, ce sor-
gho, ce soja qu’on fait venir ?
On fait un métier noble, c’est
dur, et plus on va mettre la
pression sur les agriculteurs,
plus on va décourager les
jeunes qu’on veut réinstaller.
Et on en a besoin… Je trouve
qu’il y a de beaux produits,
des gens qui sont responsables
et respectueux de l’environne-
ment.
»