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définition d’un plan de développement
de l’agriculture biologique.
Selon vous, pour quelles raisons
devons-nous rapidement faire
évoluer nos systèmes agricoles ?
François Japiot :
Le premier constat
que nous pouvons faire, selon l’actualité
scientifique, est de dire que l’agriculture
conventionnelle est responsable d’un
fort pourcentage des émissions de gaz
à effet de serre et d’un appauvrissement
des sols à l’échelle planétaire. Ce
modèle agricole qui s’appuie en
grande partie sur l’utilisation de la
pétrochimie se heurte aujourd’hui au
caractère onéreux de ces produits,
une inflation qui se trouve accentuée
par l’éloignement de nos territoires. La
transition de nos systèmes agricoles
vers un modèle vert permettrait de
répondre aux enjeux auxquels nous
sommes actuellement confrontés :
autosuffisance alimentaire, préservation
de l’environnement et amélioration de
la compétitivité de nos exploitations
agricoles sur les marchés.
Av e c l e d é v e l o p p eme n t d e
l’agriculture biologique, faut-il
migrer vers un nouveau modèle
économique ?
Clément Gandet :
Pour l’instant
nous avançons à petits pas. Nous ne
souhaitons pas faire de grands plans
que nous ne pourrions honorer comme
cela a été parfois le cas en Métropole.
C’était d’ailleurs l’un des intérêts de
notre rencontre avec Jacques Pior.
Et si cela peut nous éviter de faire
les mêmes erreurs et de gagner du
temps, c’est tant mieux. Disons que la
problématisation d’un nouveau modèle
économique se posera indéniablement
dans les années à venir. Ce qu’il
faut envisager pour opérer un vrai
changement de paradigme économique,
c’est une politique de régulation
des marchés, une diversification des
cultures, qui passera nécessairement
par une évolution de la réglementation
sur l ’ impor t a t i on des semences
biologiques (notamment en Calédonie
avec la Davar) et une valorisation de la
matière organique locale pour limiter
voire stopper l’importation d’intrants
chimiques sur nos territoires.
La recherche-action, telle que nous
la mettons en œuvre, permettra aux
acteurs de la filière agroalimentaire
d’avoir de nouveaux indicateurs et un
certain nombre d’outils nécessaires
à leur conversion. Si dans un an nos
essais sont concluants, ils contribueront
certainement, avec le concours des
instances publiques, à l’émergence
d ’ u n e n o u v e l l e g o u v e r n a n c e
agroalimentaire dans notre région.
*
La Nouvelle-Calédonie, la Polynésie française,
Wallis-et-Futuna et l’île britannique de
Pitcairn.
AGRI
CULTURE
AGRI
CULTURE
REPÈRES
>
L
E
RÉSEAU
P
OET
-
COM
La Communauté océanienne
pour l’agriculture biologique
et le commerce éthique (Poet-
com) est une association à
but non lucratif qui fédère des
groupements d’agriculteurs,
des organismes de soutien aux
agriculteurs, des organisations
non gouvernementales (ONG),
des acteurs privés, des instituts
de recherche et des organisations
pub l i que s , don t l ’ une de s
principales aspirations est
l’institutionnalisation progressive
du bio dans la région. Elle est
active dans 14 pays d’Océanie.
>
U
NE NORME OCÉANIENNE
Selon Clément Gandet, le label
Bio Pacifika, en place depuis 2008,
est un facteur d’intégration pour
les pays insulaires du Pacifique.
«
À l’echelle du Pacifique, le fait
d’avoir un outil commun nous
donne une identité commune
en mat i ère d ’ agr i cul ture
biologique et une visibilité sur
le marché. Cette norme est à
la fois facilitatrice d’échanges
économiques et techniques en
région et permet à de nombreux
pays du Pacifique d’exporter
leur production (huile de
coco vierge, café, viande, etc.)
vers l’Australie, la Nouvelle-
Zélande, l’Amérique du Nord et
l’Europe.
»
>
F
AIRE
ÉVOLUER
LA
RÉGLEMENTATION
Lors du Pacific Business Forum
(lire p.54), un atelier consacré
aux « Nouveaux ho r i z ons
agricoles » a fait valoir le besoin
impératif de trouver, via la
recherche, une alternative aux
traitements chimiques imposés
par les normes phytosanitaires,
des normes qui varient d’un pays
à l’autre en Océanie. En effet,
comment importer ou exporter
en région une production agricole
bio quand celle-ci fait l’objet d’une
pulvérisation systématique ? Une
des raisons qui conduisent à cette
aberration environnementale :
90 % des produits certifiés
bio vendus en Calédonie sont
importés d’Europe.