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«
O
n a oublié qu’on
est sur une île. Le
tout-puissant nic-
kel a étouffé beau-
coup de choses.
»
Ce constat, c’est Lionel Loubersac qui
le fait. L’homme est cofondateur et ma-
nager du Cluster maritime de Nouvelle-
Calédonie. La grappe d’entreprises
compte 58 membres, soit 2 400 emplois
dans des secteurs aussi variés que le
transport de marchandises, les bio-
technologies ou la pêche. Objectif ?
Faire entendre la voix de « l’écono-
mie bleue » qui rassemble
toutes les activités liées à
la mer. «
Avec la crise du
nickel, on est davantage
écoutés,
reconnaît Lionel
Loubersac.
Il faut que la
Nouvelle-Calédonie pro-
fite de cette crise pour
avoir de nouveaux axes
de développement éco-
nomique, de nouvelles
sources d’emplois, de recettes fiscales
et de compétences. Je suis convaincu
que le territoire est le plus doué du
Pacifique Sud pour une politique de
croissance bleue. Mais il faut définir
une vraie stratégie.
» Le potentiel
existe, mais il n’est pas facile à mesu-
rer, tout comme le poids actuel de cette
économie bleue. Pour soutenir sa dé-
marche, le Cluster maritime vient donc
de publier un rapport de synthèse sur
les enjeux maritimes du pays. Celui-
ci propose, notamment, un diagnostic
sous forme de fiche synthétique pour
chacun des vingt-huit secteurs écono-
miques identifiés. «
Par exemple, sur
la fiche concernant la surveillance
maritime, nous avons listé tous les
acteurs qui interviennent dans le
milieu : gendarmerie nationale, la
surveillance du lagon (province
Sud), les phares et balises, etc. Cela
représente 350 emplois directs et
cinquante bénévoles, des moyens
nautiques et aériens conséquents, et
donc beaucoup d’argent
», souligne
le manager du Cluster. Difficile pour
autant de donner un chiffre d’affaires.
L’IEOM (Institut d’émission d’outre-
mer) s’est également emparé du sujet
afin de mesurer le poids économique du
secteur, dans une note intitulée «
L’éco-
nomie bleue en Nouvelle-Calédonie,
un levier de croissance à action-
ner
». *Son étude prend en compte des
domaines très variés comme la pêche,
l’entretien de navire, le transport de
fret et de passagers ou encore la carto-
graphie, mais elle ne tient pas compte
de secteurs transversaux tels que les
activités récréatives ou les biotechnolo-
gies marines. «
Il est très difficile par
exemple d’estimer la part de l’écono-
mie bleue dans le tourisme
», note
Mathieu Morando, responsable du ser-
vice des études à l’EIOM. Le poids de
l’économie bleue est donc certainement
plus important que les estimations don-
nées dans l’étude. Il apparaît tout de
même que les produits de la mer sont le
deuxième poste d’exportations (1,5 %
de l’ensemble des exportations), même
s’ils se situent très loin derrière le nic-
kel. 3 % des entreprises calédoniennes
participent à l’économie ma-
ritime, pour un effectif total
salarié de 1 400 personnes,
soit 2 % des salariés du ter-
ritoire. «
Ce n’est pas beau-
coup mais ce n’est pas
négligeable lorsque l’on
compare avec d’autres
secteurs, tels que l’agri-
culture
», souligne Mathieu
Morando. «
L’économie
maritime (ou économie « bleue »)
reste néanmoins sous-développée
au regard de son potentiel
», estime
l’IEOM dans sa note.
L
ES
PROFONDEURS
Si le potentiel existe, comment faire
pour le développer ? Sur ce point, les
entreprises ne manquent pas d’idées.
Ainsi, Grégory Lasne, gérant de
Biocénose marine, propose une exper-
tise scientifique sur la biodiversité ma-
rine et l’évaluation de l’état de santé des
L’heure
de la croissance bleue
Premier port de l’outre-mer français, cinquième plus grande zone économique
exclusive du Pacifique Sud, rare variété des écosystèmes... Les atouts de la
Calédonie pour une croissance bleue sont indéniables mais sous-exploités.
À l’heure où le territoire a besoin de nouveaux relais de croissance, les
entreprises prennent le dossier en main.
“
Il y a une demande d’une
clientèle haut de gamme qui
veut partir en croisière dans des
endroits nouveaux et beaux
”
DOS
SIER
DOS
SIER
*
www.ieom.fr/nouvelle-caledonie