

U
n v e n d r e d i , 1 4 h 1 5 ,
aérodrome de Magenta.
Jérémie Gandin a proposé
qu’on se retrouve à la
cafétéria juste avant son
décollage pour Koné. Le directeur
éditorial de NCTV s’est posé à Nouméa
le matin même, comme il le fait deux ou
trois fois par mois pour les besoins de
son travail. S’il fallait résumer d’emblée
l’homme qui arrive smartphone à l’oreille,
on serait tenté, vu la métamorphose
qu’est en train d’opérer la chaîne depuis
son arrivée, de parler de «
sauveur
».
Le qua l i f i ca t i f es t t rès l o i n de
correspondre à celui qui s’assied en face
de moi. Calme, simple, discret. Peut-être
les ingrédients de la réussite.
Il parle d’emblée de cette «
page
blanche
» qu’on lui a proposée en lui
confiant la responsabilité de la chaîne
qui n’est plus seulement celle du Nord. Et
d’énumérer «
l’humilité, la simplicité, le
brassage
», qu’il trouve en Calédonie, et
qui correspondent à son «
utopie d’une
chaîne de télévision, possible même
dans ce média très puissant qui peut
paraître superficiel
». En matière de
télé, rares sont les occasions de bâtir un
tel projet. Il en sait quelque chose celui
qui a travaillé six ans à LCI, la chaîne
d’info en continu du groupe TF1. Et à
37 ans, il mesure la chance d’avoir rejoint
«
un pays qui se construit, où l’on peut
parler des initiatives, des choses qui
marchent sans être dans l’angélisme.
C’est une responsabilité.
»
F
ORCE DE
L
’
IMAGE
La responsabilité. Un mot qui ne
sonne pas creux dans la bouche de
ce Savoyard, dernier d’une fratrie de
quatre, né le jour de la fête des Mères,
bercé par les principes paternels de
la coopération internationale et par
l’engagement maternel dans le milieu du
théâtre. Jérémie Gandin a grandi dans
un village de 300 habitants, à 800 mètres
d’altitude au-dessus de Chambéry.
Enfant, on a peu de mal à l’imaginer
pratiquant le ski, la randonnée ou le
parapente. Puis c’est un parcours sans
faute : bac S, hypokhâgne et khâgne –
les fameuses classes prépa littéraires
– au lycée Champollion de Grenoble,
licence de lettres modernes à Lyon puis
maîtrise à Dublin grâce au dispositif
européen Erasmus. Une mention très
bien, qu’il réitère en 2002 en tant que
major de la 76
e
promotion de l’ESJ, la
prestigieuse école de journalisme de
Lille, où il s’est spécialisé en télévision.
Pourquoi la télé ? Il répond «
force de
l’image
» et «
travail en équipe
».
Et «
cette puissance de la télé, son
pouvoir, qu’est-ce qu’on en fait ?
» La
responsabilité, encore. De l’ESJ, où il a
fait ses armes et abordé le documentaire,
il retient «
une approche très humaine
du journalisme, inspirée des valeurs
humaines du Nord
».
G
RAND
REPORTER
Les valeurs humaines. Un autre trait qui
lui importe et qui l’a sans doute poussé
à devenir, en 2004, grand reporter à LCI
pour
Le Journal du Monde
, après deux
ans au sein de la rédaction. Il enchaîne
les missions en Europe, au Libéria, au
Congo, en Algérie, en Israël, dans les
territoires palestiniens… Quand on
évoque l’éventuelle frustration de bondir
d’un pays à l’autre à la vitesse de l’actu, il
y voit plutôt une expérience «
excitante
et formatrice
», «
une bonne école
après l’école
». N’empêche. Celui qui ne
se satisfait pas des relations superficielles
retrouvera l’ESJ en 2007, pour y donner
des cours d’écriture TV avant d’obtenir
un poste permanent de responsable des
enseignements de télévision. Former les
jeunes journalistes, définir les contenus
pédagogiques, développer les échanges
internationaux… et renforcer encore le
documentaire, avec Marcel Trillat.
Et c’est grâce à ce journaliste et
réalisateur, dont un ami est conseiller
de Paul Néaoutyine, que le lien se fera
avec la Nouvelle-Calédonie – sans se
nouer tout de suite.
F
AIRE
«
AVEC
»
À l’occasion d’un film qu’il entreprend
sur l’association Pays de Savoie solidaires
où exerce son père, Jérémie Gandin
retrouve les valeurs qui ont lentement
infusé sa conscience professionnelle.
«
C’est là que j’ai compris ce qui
prévalait : faire avec et pas à la place,
dans une démarche de long terme,
en étant à l’écoute
». Pas très étonnant
qu’il ait été «
aussi bien accueilli
» ici.
Après un retour en Savoie puis en
IDÉALISTE
de terrain
Il a pris ses fonctions au début de cette année. Huit mois plus tard, la chaîne
du Nord a opéré sa mue. Jérémie Gandin, directeur éditorial de NCTV, est
aux manettes de ce renouveau. Rencontre.
“
Cette puissance
de la télé, qu’est-ce
qu’on en fait ?
”
PORTR
AIT
PORTR
AIT
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