Femmes : Juillet 2017

Simone Veil (13 juillet 1927 – 30 juin 2017) d’aller à l’étranger, la mort : une femme en meurt chaque jour. « Aucune femme ne recourt de gaieté de cœur à l’avortement. Il suffit d’écouter les femmes. C’est toujours un drame, cela restera toujours un drame. » Son discours touche des milliers de femmes. « Je n’ai jamais ressenti autant de haine, une vraie haine, une haine qui veut tuer », confiera-t-elle dans une interview en 1999 à propos des débats qui dureront 25 heures. Simone Veil est victime d’intimidations et de menaces pendant des mois. Pourtant issus de sa propre majorité, des députés la traitent de « nazie » et poussent l’indignité jusqu’à comparer l’avortement à la solution finale, réveillant ses souvenirs de déportée et une indicible souffrance, « au-delà des larmes », expliquera-t-elle plus tard. Mais Simone Veil ne lâche rien. Et l’emporte. Grâce à son autorité naturelle, la maternité devient un choix pour les Françaises. En outre, elle fait adopter la loi d’orientation sur le handicap, la première du genre. Cette loi-cadre tiendra trente ans, puisque la suivante ne sera votée qu’en 2005 ! Espérance européenne En 1979, Simone Veil a 54 ans et VGE voit en elle le symbole de la réunification franco-allemande, pouvant définitivement tourner la page des guerres mondiales. Elle est élue présidente du Parlement européen. Première femme à occuper la fonction, elle sera réélue en 1984 et en 1989. En 1993, elle est nommée ministre des Affaires sociales, de la Santé et de la Ville dans le gouvernement dirigé par Balladur. Mais l’Europe est le plus grand combat de sa vie. L’effondrement du mur de Berlin serait même son souvenir le plus émouvant. Pendant treize ans, elle occupera donc différentes fonctions au sein du Parlement européen. À propos de l’Europe, elle a déclaré : « Quand je regarde ces soixante dernières années, c’est ce que l’on a fait de mieux. » En 1998, Simone Veil entre au Conseil constitutionnel pour neuf ans, où elle s’occupe de la primauté du droit communautaire européen sur la législation française. Immortelle En 2010, à 82 ans, elle entre à l’Académie française, au fauteuil numéro 13, celui de Racine, un des auteurs préférés de son père. Sous la Coupole, elle pense à ses parents qui auraient été tellement fiers. Dans son discours, elle parle d’Europe, citant Victor Hugo qui, lui-même élu à l’Académie en 1841, avait ébauché le projet d’une Union européenne fondée sur ce qu’il est convenu aujourd’hui de nommer le couple franco- allemand : « La France et l’Allemagne sont essentiellement l’Europe. L’Allemagne est le cœur, la France est la tête. Le sentiment et la pensée, c’est tout l’homme civilisé. » Sur son épée d’immortelle, Simone Veil a fait graver plusieurs symboles : l’attache du fourreau représente un visage de femme souriant, rappelant son engagement en faveur de la cause des femmes. «Liberté, Égalité, Fraternité», la devise française. «Unie dans la diversité», la devise européenne… Deux mains enlacées, sur la fusée, évoquent la réconciliation entre les peuples et des branches d’olivier, sur la main du haut, représentent la vie et la paix. Numéro 78 651 Sur la main du bas de l’épée, les flammes des fours crématoires et, sur l’autre côté de la garde, le nom du camp d’extermination de Birkenau. Sur la lame : 78 651, son numéro de déportée à Auschwitz-Birkenau. Ce tatouage sur son bras, elle l’a gardé toute sa vie pour affronter chaque jour le souvenir des camps. Faire vivre la mémoire de la Shoah, coûte que coûte. Alors qu’elle place dans la construction européenne une espérance sans limite, pas question de pardonner : « Ce n’est pas à moi de pardonner la mort de six millions de Juifs. » En 2004, devenue une vieille dame, Simone Veil est revenue à Auschwitz, accompagnée de ses petits-enfants. Elle a retrouvé les baraquements où elle avait survécu avec sa sœur Milou, l’unique témoin d’un drame insondable qu’elle perdra plus tard dans un accident de voiture. « Une brisure irrémédiable, » selon son fils. Simone Veil n’a pas reconnu le ciel bleu, autrefois plombé par la fumée des fours crématoires. Elle s’est rappelée l’odeur des corps brûlés, l’épuisement, la faim, le manque de sommeil, les humiliations, les cris, la peur. Il faisait froid en 2015, le jour des commémorations. Elle s’est demandé comment ils faisaient, comment ils avaient pu tenir. « J’ai le sentiment que le jour où je mourrai, c’est à la Shoah que je penserai », avait-elle confié. Le 30 juin 2017, Simone Veil s’est éteinte, à l’âge de 89 ans. Sa place est au Panthéon. Elodie Lanfroy Loi Veil : 25 ans de retard pour le Caillou ! Votée en 1974, la loi Veil légalisant l’interruption volontaire de grossesse (IVG) sous l’unique volonté de la mère, est entrée en vigueur en 1975. Mais il a fallu attendre 1979 pour qu’elle soit définitivement appliquée. Le rembour- sement de l’IVG par la Sécurité sociale a été voté fin 1982. Enfin, le délai légal pour pratiquer une IVG est passé de dix à douze semaines de grossesse en 2001. Mais ça, c’est pour la Métropole… Incroyable mais vrai : sur le Caillou, les femmes ont dû attendre 25 ans de plus ! La pratique de l’IVG n’a été légalisée qu’en 2000, dans un cadre comparable à celui de 1975 en Métropole. Ce n’est qu’en 2008 que les conditions légales de réalisation de l’IVG sont devenues comparables à celles de la Métropole. ACTUS 11

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