Femmes : Octobre2017

Plus un enfant est petit, plus il perçoit la mort d’un point de vue sensoriel. C’est la disparition physique qui marque son esprit. Le timbre de la voix, le toucher, l’image de la personne disparue lui manquent très concrètement. D’ailleurs, un nourrisson qui perd sa mère vit cette mort comme une amputation, une perte d’une partie vivante de lui-même. Ce deuil, non élaboré psychiquement, ne s’inscrit pas dans la mémoire du bébé mais dans son propre corps. Il ressent des années plus tard, sans même pouvoir l’identifier, une manière d’être porté ou bercé, l’odeur d’un parfum. Cela peut laisser des traces indélébiles. Plus grand, l’enfant intègre l’idée de mort par les différentes expériences de perte qu’il traverse : celle de la perte de son doudou, d’un animal domestique, la séparation avec maman à la crèche ou à l’école, etc. La mort passe d’abord par la notion d’abandon. Puis, par tout ce qu’il apprend à l’école et auprès de ses aînés, il est forcé d’accepter la notion de mort. La réalité s’impose à lui exactement comme pour la « révélation » de la non-existence du père Noël. Entre ses 4 et 6 ans, il sort donc de son univers magique et perd son impression de toute puissance. Comment répondre à ses questions ? « Maman, c’est quoi la mort ? » Cette question existentielle est de la plus haute importance pour un enfant et il faut éviter d’attendre la venue d’un drame pour en parler. Des termes imagés sont souvent employés, tels que « Papi est parti rejoindre Mamie au ciel » ou encore « Il est parti en voyage »… Cette stratégie a des limites, risquant de créer une confusion dans l’esprit de l’enfant. Le mieux reste d’aborder le sujet de façon simple et honnête, sans grand discours. Selon Catherine Dolto, pédiatre, psychanalyste et auteur du livre Si on parlait de la mort, « Il n’y a rien de plus toxique que le mensonge ! L’enfant souffre davantage, il s’imagine des tas de choses... Tous les ans, je reçois des enfants très perturbés parce qu’on leur a raconté de fausses histoires sur la disparition d’un proche... » Ainsi, il faut éviter de dire à un enfant que la mort est temporaire et que l’être décédé s’est juste absenté pour longtemps. Il faut simplement lui expliquer qu’il ne reviendra pas. Si cela peut être dur à entendre sur le coup, l’acceptation n’en sera ensuite que moins douloureuse. En revanche, les parents ont le droit de dire : « Je ne sais pas ce qu’il advient après la mort », ou, s’ils sont croyants : « Nous le retrouverons au paradis », du moment qu’ils acceptent de partager leur point de vue avec l’enfant et qu’ils lui transmettent un début de réponse et de réflexion. Doit-il assister à l’enterrement ? Longtemps, on a véhiculé l’idée selon laquelle il fallait protéger les enfants des réalités trop dures de l’existence. Mais pourquoi ? Ce genre de réflexe ne fait que repousser le moment où l’enfant devra affronter la réalité. C’est exactement le même principe de fuite lorsqu’un parent rachète un doudou identique à celui perdu la veille. De nombreux psychologues conseillent en effet de laisser l’enfant assister aux funérailles. Cette cérémonie peut lui permettre de mieux comprendre ce qui se passe et de bénéficier du soutien familial. Paroles réconfortantes, gestes tendres, textes en souvenir de l’être cher… L’enfant doit pouvoir observer, assimiler le deuil en se fabriquant des souvenirs et pleurer librement. C’est enfin le meilleur moyen de faire ses adieux à une personne disparue. Si l’enfant le souhaite, il peut aussi voir le corps du défunt et ajouter dans le cercueil, une photo, un objet, un dessin. Comment l’aider au mieux à surmonter un décès ? Il arrive parfois que l’enfant se mette à développer un sentiment de culpabilité et se sente responsable du décès du défunt. Un enfant peut se souvenir avoir pensé de mauvaises choses, avoir souhaité sa mort par colère passagère. Il peut également se sentir responsable en pensant ne pas avoir assez aimé cette personne. Expliquez-lui qu’il n’y est pour rien, que les pensées ne tuent pas et qu’il arrive à chacun d’entre nous d’avoir parfois de mauvaises pensées. Dans d’autres cas, certains enfants s’infantilisent, demandent davantage de bisous et d’attention. C’est le signe qu’ils vivent mal le décès et ont des difficultés à faire le deuil. Laissez-les alors venir vers vous, à leur rythme et sachez vous montrer présente. Evitez aussi de les laisser seuls dans leur chagrin et essayez de multiplier avec eux les instants de détente, les sorties ou bien les moments de câlins. Et si votre enfant le souhaite, une visite régulière sur la tombe du défunt peut être d’un grand réconfort, malgré les idées reçues. Et en cas de gros blocage ? Il arrive qu’un enfant saute sur les tombes au cimetière ou pique un fou rire pendant la messe. Parfois l’enfant ne réagit même pas à l’annonce de la mort de quelqu’un et retourne jouer dans sa chambre comme si de rien n’était. Ces réactions sont propres à son caractère et son vécu. Il ne faut pas imaginer qu’il puisse se comporter comme un adulte. Dans d’autres cas, les bambins se déclarent malades ou s’inventent un ami imaginaire. Tout ceci signifie qu’ils ont compris la mauvaise nouvelle et qu’ils encaissent tant bien que mal. Dans certains cas plus extrêmes, certains enfants se mettent à devenir agressifs, refusent la compagnie des autres enfants ou encore ont des troubles du sommeil. C’est seulement si ces attitudes persistent qu’il faut aider son petit à exprimer ce qu’il ressent. Les personnes les plus liées avec le disparu ne sont pas forcément les mieux placées. Si les mots des proches ne parviennent pas à désamorcer le blocage, une séance chez un thérapeute est envisageable. n Beaucoup de parents se posent la question. Souvent, on évite le sujet pour ne pas perturber les enfants et les protéger, tout simplement. Mais il arrive un jour où on ne peut plus reculer. Ils attendent la vérité… Sources : Parents, Auféminin, Le journal des femmes Lui parler de la mort 22 nOS GOSSES

RkJQdWJsaXNoZXIy MjE1NDI=