Femmes : Octobre2017

C’est un témoignage touchant qui parlera à de nombreuses femmes. Garance Doré, 42 ans, met des mots sur les maux de notre époque : le désir d’enfant, la pression de l’horloge biologique, le parcours difficile pour essayer à tout prix d’en avoir... et finalement, l’apaisement. L’ex-illustratrice, devenue bloggeuse mode (730 000 abonnés sur Instagram) puis photographe, auteure (Love x Style x Life) et femme d’affaires (elle a créé l’Atelier doré, un site web et un studio de création), a choisi la newsletter féministe de Lena Dunham, Lenny, pour s’exprimer. Publié vendredi 18 août, son récit a été largement relayé dans les médias et a fait réagir sur les réseaux sociaux. Une horloge biologique bien intégrée Pendant longtemps, Garance Doré n’a pas songé à avoir d’enfant. C’est à l’âge de 37 ans que l’idée commence à la travailler. Mais à cette époque, son couple n’est pas prêt, si bien qu’à nouveau célibataire à 39 ans, elle envisage d’avoir un enfant seule. C’est alors qu’elle rencontre Chris Norton, 39 ans aussi, sans enfant également, qui deviendra son mari. Elle décide alors de profiter de sa vie de jeune mariée et de décaler ses plans à un peu plus tard. Même si l’horloge biologique a été bien intégrée : « À 20 ans, ma grand-mère me disait qu’il était temps d’avoir un enfant (...). À 30ans, ma mère me disait de ne pas attendre trop longtemps ». À presque 41 ans, elle consulte une gynécologue pour lui expliquer son projet... et là, c’est la douche froide... « Elle m’a effrayée [en me disant] ‘’votre taux de ceci est beaucoup trop haut, votre taux de cela est beaucoup trop bas (...). À votre âge, je recommande une insémination intra-utérine le mois prochain, parce que nous n’avons pas une minute à perdre. Pas une minute à votre âge.» ». Mais ni l’insémination ni les traitements hormonaux ni la fécondation in vitro (FIV) tentés par la suite ne fonctionneront. « À partir de ce moment, mes règles sont devenues le signe de l’échec de mon corps, de l’échec de ma féminité, de l’échec de ma vie », confie-t-elle. De petite amie joyeuse à martyre de la fertilité Pendant de longs mois, son désir d’enfant tourne à l’obsession. Elle arrête l’alcool, le café, les voyages, les sorties, les petits plaisirs, se retrouve gonflée et sur les nerfs à cause des hormones, à pleurer quotidiennement et à avoir des rapports non spontanés les jours d’ovulation. « En quelques mois, je suis passée de petite amie joyeuse et agréable à une martyre de la fertilité », se souvient-elle. La rencontre avec une psy la sortira de cette spirale infernale. La bloggeuse arrête les traitements, décide de laisser faire la nature et de se reconnecter à elle-même et à son mari. Garance a fêté ses 42 ans, plus légère. « Mon histoire m’a aidée à comprendre l’énorme pression subie par les femmes pour devenir mère, une pression que j’ai complètement intériorisée et qui me questionne aujourd’hui, conclut-elle. L’idée d’avoir une vie pleine, de tout avoir. Comme si nos vies ne pourraient pas être complètes sans enfant. La pression, aussi, d’utiliser tous les moyens possibles pour avoir un enfant, parce qu’aujourd’hui, si vous voulez un enfant, vous allez en avoir un. Si ce n’est pas le cas, eh bien, ça signifie que vous n’avez pas assez essayé. Cela doit s’arrêter. On peut être accomplie sans avoir coché toutes les stupides cases, sans un ‘’shiny baby ‘‘ (un beau bébé). » n Garance Doré, nullipare et accomplie Installée aux États-Unis, l’influenceuse française dénonce la pression faite aux femmes pour devenir mère. Comme si nos vies ne pourraient pas être complètes sans enfant dossier 16

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