18 voulais plus travailler. Il me semblait que le monde de l’entreprise, à tous les échelons, est un lieu abrutissant, où les gens manquent de fantaisie, se prennent beaucoup trop au sérieux. Ce sentiment ne m’a pas quitté, même si j’ai toujours travaillé, assumé mes responsabilités. Mes filles, de 23 et 20 ans, n’ont pas fait de crise d’ado non plus. Il faut croire que c’est de famille… » « J’étais plutôt timide et réservée » Sandra, 40 ans, secrétaire comptable, mère de deux filles de 17 et 13 ans « Je suis la plus jeune d’une fratrie de quatre enfants. Mon père était contremaître et ma mère s’occupait d’enfants à la maison ce qui lui permettait d’être très présente. Chez nous, il régnait une atmosphère harmonieuse. Mon père incarnait l’autorité, mais avec mesure. Derrière sa pudeur, on sentait beaucoup de bienveillance et d’amour. Quant à ma mère, elle s’est toujours montrée très proche et très ouverte. À l’adolescence, quand j’ai vu des copines s’affirmer, répondre à leurs parents, entrer en conflit avec eux, je me suis posé des questions. J’étais attirée par elles, admirative de leurs révoltes, de leur détermination. Elles semblaient se faire davantage entendre que moi, qui étais plutôt timide, réservée. Mais, au bout d’un moment, j’ai dû admettre que c’était mon caractère. Pourquoi aurais-je été en rébellion contre ceux que j’aimais ? Et puis j’avais des activités, comme le basket-ball, que je pratiquais de façon intense, qui me permettaient d’être bien socialisée, d’avoir des amies. À l’âge adulte, je n’ai pas non plus connu de crise existentielle. Cela fait dix-huit ans que je suis mariée, et je me sens heureuse dans ma vie de couple, dans mon métier. Je suis plus épanouie que je ne l’étais à l’adolescence. Mes deux filles ont 17 et 13 ans, et, pour l’instant, elles ne montrent pas de signes de mal-être. Elles sont adorables. Mon rôle ? Mettre des mots sur leurs maux, comme ma mère le faisait avec moi. » « Être sage a été ma rébellion à moi » Marie, 30 ans, en couple, travaille dans la communication « À l’adolescence, je me suis sentie en décalage avec les autres. Je n’avais pas de problèmes avec mes parents ni avec mes deux sœurs. Je n’éprouvais pas le besoin de boire de l’alcool ou de fumer des joints. Même les garçons n’étaient pas vraiment ma priorité à l’époque. Je me sentais différente et je n’avais aucune envie de suivre le troupeau. En fait, être sage a été ma rébellion à moi ! J’ai toujours eu un tempérament conciliant, je fuyais le conflit. Certes, je n’étais pas très bien dans ma peau, j’avais des petits complexes, mais rien de vraiment alarmant. Il faut dire que mes parents étaient très à l’écoute, nous laissant de la liberté tout en nous donnant un cadre et des limites. Après le bac, je suis partie faire des études. Le fait d’avoir eu tout de suite mon indépendance m’a permis de me construire hors du foyer familial. C’est plutôt aujourd’hui, à 30 ans, que je connais un sentiment de révolte. Comme pas mal de gens de ma génération, me semble-t-il, j’ai l’impression d’avoir tout bien fait, de m’être coulée dans le moule. Je me pose beaucoup de questions. Nous vivons dans une société régie par l’argent, qui va toujours plus vite, dans une ronde vaine et frénétique. On en oublie les fondamentaux. Je voudrais revenir à un mode de vie plus simple, plus sain. Est-ce moi ou est-ce le monde qui est en crise ? » Dossier
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