Femmes : Octobre 2021

Dossier 17 pour explorer les épisodes traumatisants de nos vies antérieures. Aux Etats-Unis, la «karma thérapie» est passée au troisième rang des thérapies alternatives, après les traitements antitabac et les cures d’amaigrissement… La pratique n’est pas nouvelle, mais elle a souvent été tournée en dérision par les médias, qui se sont gaussés du «retour à la vie» de centaines de Napoléon ou Marie- Antoinette… « Dans les milliers de cas que j’ai traités, je n’ai jamais eu Napoléon, Marie-Antoinette, ni même Cléopâtre ! explique Gilles Guattari, psychothérapeute. Ce sont des gens simples qui reviennent à la mémoire : un marchand, un soldat, un enfant, un prêtre… » Le thérapeute a totalisé plus de huit mille séances et formé quelques dizaines de praticiens à sa propre technique «d’expansion de conscience». « Lorsqu’il y a guérison, les symptômes ne réapparaissent pas ailleurs et le rééquilibrage est durable , assure-t-il. Affirmer qu’ils se reproduisent ici ou là est une idée sans fondement. Mais la capacité de guérison de cette technique a de quoi déranger. » Et de raconter le cas d’Alain, journaliste. À la suite d’un grave accident de voiture, il était sous l’emprise d’une angoisse aiguë et souffrait d’une polyarthrite qui empêchait tout mouvement de ses bras. Au cours d’une séance, il se retrouve dans la peau d’un paysan du Moyen Age. Le prévôt vient lui réclamer son impôt. Pris de colère, il se révolte, le fait tomber et le tue. Condamné, il subit le supplice de la roue. « Nous avons travaillé sur cette séquence , explique Gilles Guattari. Lorsque cet homme a réussi à comprendre les liens entre le passé et le présent, l’angoisse a disparu. Et la polyarthrite aussi… » Peut-on vraiment parler de vies passées ? « Impossible à dire , répond le psychothérapeute. Tous les psys savent qu’il peut exister une vision intérieure plus vraie que nature sans qu’il y ait jamais eu la moindre réalité physique. Ce dont on est sûr, c’est que, outre les résultats, ce processus ouvre la conscience sur une vision globale de la vie, une vision d’unification. C’est ce que l’on appelle la cohérence. Et c’est probablement l’une des qualités dont nous avons le plus besoin aujourd’hui. » La montée de l’individualisme L’histoire de la réincarnation correspond à un changement majeur : la montée de l’individualisme, de la personne comme unité psychologiquement autonome, contenue dans des limites étanches et stables. Auparavant, l’individu était essentiellement perçu comme un point de convergence dans un réseau d’énergies psychiques relié verticalement aux ancêtres et horizontalement à la communauté. Il n’était qu’une manifestation d’un psychisme collectif. Avec le temps, il a acquis sa propre autonomie, sa propre identité. Processus qui s’est accéléré ces vingt dernières années. Cette poussée de l’individualisation s’accompagne d’une angoisse existentielle face à la mort, à la disparition du moi… La résolution de cette énigme semble nous échapper. Menons-nous une ou plusieurs vies ? Tout dépend sans doute si l’on se situe dans le temps ou hors de lui. Notre plus grande part se trouve emportée par l’irrésistible fleuve chronologique. La sagesse nous suggère de ne pas trop nous en émouvoir et de contempler le spectacle, avec compassion et… humour. Histoire de l’humanité Si le terme «réincarnation» a été créé en 1857 par Allan Kardec, le fondateur du spiritisme, cette hypothèse remonte à l’aube de l’humanité. Elle traverse les religions animistes, chamaniques ou primitives sous la forme de « transmigration des âmes » : il faut mener une vie pure pour ne pas renaître dans un corps d’animal. Elle se retrouve dans diverses cultures – la «métempsycose » (animation en succession) pour les Grecs. Elle apparaît dans la plupart des religions orientales, avec des différences. Pour les bouddhistes, nous n’avons pas d’âme personnelle : le moi est une pure illusion. Officiellement, l’islam rejette cette idée. Selon certains chefs religieux, il serait plus juste de dire qu’elle laisse le libre arbitre aux lecteurs des textes sacrés. Dans le judaïsme, les textes de la kabbale parlent du «gilgul » (transmigration) et de « teshouva» (retour), une nouvelle chance donnée par Dieu. Pour les chrétiens, la métempsycose a été condamnée en 553, au concile œcuménique de Constantinople, pour défendre l’originalité de la résurrection. Et si la clé de nos difficultés actuelles se trouvait dans nos existences passées ? C’est l’hypothèse, dérangeante, de la « karmathérapie », qui séduit de plus en plus de patients et de psys.

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