Femmes : Avril 2017

65 Portrait Sculpturale ! Voyageuse du bout du monde, Marjorie Tiaou a décidé voici huit ans de revenir s’installer à Ouvéa pour sculpter. Si ses œuvres s’inspirent largement de l’art traditionnel kanak, elles sont également à l’image de leur créatrice : métissées et inspirées. Texte : Patricia Calonne - Photo : Aude-Émilie Dorion Le moins que l’on puisse dire, c’est que Marjorie Tiaou est une femme étonnante. Ne serait-ce que par son métier puisque Marjorie est sculptrice sur bois à Ouvéa. Mais pas que… Car si aujourd’hui elle a fait de sa passion son métier, ses études ne la destinaient pas vraiment à ça puisqu’elle a passé un bac littéraire et a poursuivi avec un BEP en cuisine en Corse ! « Je n’avais que 20 ans et je ne me sentais pas d’assumer les lourdes responsabilités d’un restaurant », nous confie-t- elle dans un sourire éclatant. On peut tout de même se demander ce que faisait cette jeune fille, née à Nouméa, dans cette autre île bien éloignée du Caillou… « Mon père était un grand voyageur, je n’ai quasiment pas grandi en Calédonie. Du coup, lorsque je suis rentrée il y a quelques années, j’ai véritablement découvert mon île et ma famille. » La découverte de ses racines kanak associée au fait que son père et ses frères et sœurs sculptent également font que Marjorie n’hésite pas : elle fera de la sculpture sur bois son métier ! Elle s’installe donc à Ouvéa et attaque avec tronçonneuse, raboteuse, perceuse… Oui, car Marjorie ne fait pas dans le petit ! « J’ai des pièces qui font quinze mètres de haut, dit-elle avec ce même sourire désarmant. C’est très physique ! » On veut bien la croire… Son inspiration, elle la trouve dans l’histoire et les légendes kanak principalement mais le tout passe par le prisme de sa personnalité, de ses voyages, de ses expériences, de sa féminité… « Je fais de l’art kanak, dans le respect de ce qui existe mais en ajoutant ma patte. Je sculpte des chambranles, des gardiens, des flèches faîtières, des poteaux… Je ne détourne pas leur rôle ni leur fonction mais je peux y ajouter des motifs inspirés d’autres peuples, des éléments figuratifs ou des symboles du Pacifique. » Car cette voyageuse est très claire : « En tant que Kanak, on ne peut pas rester dans un moule ; il faut aussi être ouvert aux autres. C’est un échange. » « La nature m’inspire beaucoup mais je suis également très à l’écoute des gens, c’est ce qui m’amène à traiter différents thèmes dans mes œuvres », précise la jeune femme qui vit un peu retirée du monde tout au nord d’Ouvéa. Quand elle ne sculpte pas, Marjorie se voue à son autre passion, la cuisine, pratique le yoga et fait du sport. Et voyage ! « J’aime sortir du pays et c’est important histoire de ne pas saturer. J’aime bouger mais en même temps, à Ouvéa, quand tu arrêtes de travailler, tu es en vacances ! » Elle est d’ailleurs également très investie dans le tou- risme de son île (elle a été présidente du Point Info d’Ouvéa) et sert de guide aux touristes de passage à l’occasion. Et quel meilleur guide que cette jeune femme qui, après avoir voyagé dans le monde entier, a décidé de revenir s’ancrer dans ce magnifique bout de terre qu’est Ouvéa ? Terre dont elle est fière. Et elle l’affirme clairement : « J’ai envie de représenter mon île. » Et ça se voit ! n Vous pouvez découvrir le travail de Marjorie sur Facebook : Sculpteur Tribal-cut

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