Femmes : Août 2016

dossier Aux quatre coins de Maré, tout le monde connaît Hudruné Malo, qui ose à peine se raconter. Pourtant, très investie dans sa communauté, elle contribue à la valorisation de son île et de ses produits. Hudruné Malo est née à Ténane, il y a 63 ans. Elle y vit encore avec son mari, Itang Fouye, qu’elle a épousé il y a 38 ans. Maman de trois filles, elle est aussi six fois grand-mère. Quand elle a un peu de temps pour elle, Hudruné s’occupe de sa petite famille, comme elle l’appelle. Tous ceux qui la côtoient se demandent comment elle parvient à faire tout ce qu'elle fait. Elle est partout sur l'île et en-dehors, dès qu'une manifestation donne à Maré l'opportunité de valoriser son savoir-faire local. Son énergie contraste avec sa réserve. Enfant sage et respectueuse des règles dictées à la maison par son père diacre, elle reste fidèle à sa droiture et aux valeurs d'amour du prochain. A la demande de son papa, elle s'investit dans l'association des jeunes de l'Église protestante, participe aux coutumes, aux fêtes culturelles, ainsi qu’à la vie politique et économique de l'île. « Il était lui-même très investi et voulait que ses enfants le soient aussi, confie-t-elle. On l’appelait ‘’le vieux dictionnaire’’ car il savait beaucoup de choses sur tout. Il était comme un enseignant. » Après trois ans passés à Nouméa au lycée technique, elle doit rentrer à Maré. « Mon père considérait qu'il n'était pas nécessaire que ma sœur et moi fassions plus d'études, cela n'apportant pas de bénéfice supplémentaire à la famille. » Qu'à cela ne tienne : les deux sœurs imaginent alors un projet familial et créent une entreprise dédiée aux espaces verts, toujours avec l’accord de leur père, un peu réticent. Valoriser les produits de Maré En parallèle, Hudruné cultive son champ et vend sa production sur les marchés. Elle aide aussi son père sur celui de Ténane. « Il l’a créé pour que les vieilles de la tribu, en charge des enfants scolarisés, puissent trouver de quoi leur préparer à manger à l'école », se souvient-elle. Le clan Thuma est réputé pour son savoir- faire en matière de gestion. L’entreprise de location de voitures dont s’occupe Hudruné avec son mari en bénéficiera aussi. Cogérante de deux entreprises de services aux résidents et visiteurs de l'île, secrétaire du marché de Ténane et vendeuse sur les autres, elle quitte les associations de femmes auxquelles elle adhérait pour mieux assurer ses responsabilités économiques. Hudruné reste néanmoins très attachée à son Église et donne beaucoup de son temps à sa paroisse. À l'aube de ses 60 ans, un nouvel engagement se présente qu’elle ne peut refuser. Le grand chef Naisseline lui confie les clés des marchés communaux. Cinq ans après, elle a respecté la parole du grand chef et est devenue la référence de l'île en matière de valorisation des produits locaux. Le lien social comme motivation Les mardi et vendredi matin, Hudruné arrive au marché de Tadine à 4h30 pour ouvrir les modules et permettre aux femmes de préparer leurs étals avant l’ouverture. Quand une fête culturelle a lieu ailleurs sur l'île, comme à Nece pour celle de l'avocat, elle organise le déplacement des marchés et des vendeuses. C’est elle aussi qui assure la promotion de Maré lors d'évènements tels que la Foire des Îles. La commune peut s’appuyer sur le savoir-faire et la générosité d'Hudruné, qui ne compte pas ses heures. Elle est d’ailleurs aujourd'hui trésorière du Syndicat d'Initiative Nengone. « Je ne regrette pas ces engagements. J'ai développé beaucoup de liens, de relations avec les gens de Maré. Ça me donne du courage pour continuer à gérer tout cela au mieux, confie-t-elle, d’une voix presque chuchotée. Car plus on donne, plus on a en retour. » n Une vie pour maré Texte et photo : Sophie Mendès 14

RkJQdWJsaXNoZXIy MjE1NDI=