TRANCHE DE VIE JE FAISAIS PARTIE DE CES FEMMES QUI SE FICHENT TOTALEMENT DE LA SYMBOLIQUE DE LA SAINT-VALENTIN. NON, JE NE PLAISANTE PAS. C’EST VRAI DE VRAI. MAIS C’ÉTAIT SANS COMPTER SUR LA VIE QUI A PLUS D’UN TOUR DANS SON SAC… SURPRISE DE LA SAINT-VALENTIN… Cela faisait maintenant plus de trois mois que Fabien était parti en mission au Mali. Nous nous étions rencontrés six mois avant son départ lors d’une soirée chez des amis communs. L’attirance avait été immédiate. Le coup de foudre, diraient des filles plus romantiques que moi. De façon plus réaliste, il était difficile de résister à cette montagne de muscles souriante et tranquille. J’ai eu la chance d’être l’élue et je ne l’ai pas laissée passer. Fabien s’est révélé être, en plus, un compagnon de vie idéal et un amant délicieux. Nos vies professionnelles nous laissaient peu de temps libre, mais chaque rendez-vous était plus agréable que le précédent. À première vue, nous étions sur des planètes différentes, lui dans les services spéciaux, moi dans la communication. Des extrêmes qui se révélèrent vite avoir beaucoup en commun. Quand nous avions étanché la soif de nos corps, nos discussions à bâtons rompus auraient pu ne pas avoir de limites. Seul le désir que nous avions l’un de l’autre et qui ne semblait jamais vouloir se tarir, nous rappelait à l’ordre, transformant nos paroles en soupirs… Le seul sujet de conversation que nous évitions soigneusement était notre avenir commun. Fabien m’avait mise en garde. Son travail l’obligeait à de longues missions pendant lesquelles il ne pouvait être joint par personne. Même les destinations restaient souvent confidentielles. Difficile de construire ou de faire des projets dans ces conditions. Dans l’enthousiasme de notre rencontre, j’avais fait la sourde oreille aux messages d’alerte qui s’allumaient en nombre dans ma tête. On était si bien. Un jour pourtant, il a bien fallu affronter la réalité. Fabien était déjà là quand je suis rentrée du travail, il m’a embrassée tendrement et m’a suggéré une douche pendant qu’il me servait un verre de vin. Cette douceur empreinte de fermeté ne laissait rien augurer de bon. Je le rejoignis donc bien vite, cheveux mouillés et peignoir noué à la hâte. Cette précipitation l’aurait fait sourire en d’autres temps. Là, il était grave face à moi. « Je vais partir. Je ne sais pas pour combien de temps. Je peux juste te dire que c’est au Mali. Comme tu n’as pas d’existence officielle, je ne peux ni te tenir au courant, ni te contacter. En cas de problème personne ne te préviendra. Il va donc falloir que tu me fasses confiance. Attends-moi. Je reviendrai et nous pourrons parler de notre avenir ensemble. » Il a pris mon visage entre ses mains le temps d’un long baiser. Puis dans un souffle : « Je pars maintenant, mon avion décolle dans deux heures. » Je n’ai même pas eu le temps de me ressaisir pour lui dire au revoir, la porte s’est doucement refermée derrière lui. Pendant les trois mois de silence qui ont suivi, j’ai tenté de me raisonner de toutes les manières. Je l’attends ? Je ne l’attends pas ? Jusqu’à ce que je comprenne que quoi qu’il arrive, je n’étais pas prête à l’oublier et qu’il fallait juste apprendre à vivre avec son souvenir. La veille de la Saint-Valentin, ma douce Patricia m’a appelée. Sa gentillesse et son enthousiasme ont opéré comme d’habitude et lorsqu’elle m’a proposé une soirée chez elle le lendemain, je n’ai pas pu lui résister malgré la douleur de me retrouver chez ces mêmes amis qui m’avaient fait rencontrer Fabien. Le soir de la fête des amoureux, je me présentai à la porte, affichant une bonne humeur plus qu’artificielle. Tout le monde semblait m’attendre avec impatience. Patricia, l’œil brillant, me tendit une coupe de champagne en s’exclamant d’un ton solennel qui ne lui ressemblait pas : « On a livré un paquet pour toi. » Elle me désigna un énorme carton posé à côté du canapé et que je n’avais pas vu en entrant. J’étais incrédule et je me demandai ce que mon amie, jamais à court d’idées, avait encore inventé pour me distraire de ma mélancolie. La dizaine d’amis présents semblaient retenir leur souffle. Je me dirigeai donc vers le carton et commençai à l’ouvrir. Quand soudain, le paquet a littéralement éclaté tout seul laissant apparaître un Fabien un peu rouge mais tout sourire ! Il était rentré la veille et avait tout réglé avec ses amis. Merveilleuse Saint-Valentin ! Depuis, il part toujours mais je suis sa femme et ça change tout. Et même s’il n’est pas là à la Saint-Valentin, je ne méprise plus jamais cette fête pas si anodine que ça. n 26
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