Vente d’un bien démembré : quoi faireavec leprixde vente ? En principe, lorsque vous êtes propriétaire d’un bien, vous en avez la pleine propriété. Vous disposez de tous les droits sur ce bien : vous pouvez l’utiliser, le vendre, le donner… Dans certaines situations, la propriété est « démembrée », le démembrement permet d’attribuer à différentes personnes des droits distincts sur un même bien : Le nu-propriétaire a la nue-propriété : il ne peut pas utiliser le bien, mais son accord est nécessaire pour vendre le bien. L’usufruitier a l’usufruit : il peut utiliser le bien -s’en servir, le mettre en location et percevoir les loyers- mais ne peut pas le vendre sans l’accord du nu-propriétaire. Ce démembrement de propriété intervient le plus souvent dans le cadre de deux opérations : Une donation : un proche vous donne la nue-propriété de son bien, mais conserve l’usufruit. Cela permet entre autres choses d’optimiser la fiscalité, les bénéficiaires paient moins de droits de donation. Une succession : le conjoint survivant reçoit la totalité de l’héritage du défunt en usufruit et les enfants reçoivent de la nue-propriété. Cela permet au conjoint d’être protégé financièrement jusqu’à son décès. Lorsque l’usufruitier et le nu-propriétaire cèdent ensemble la pleine propriété de biens démembrés, trois possibilités s’offrent à eux concernant le sort du prix de vente en fonction de leurs objectifs. 1re possibilité : répartition du prix de vente Dans cette première hypothèse, le démembrement prend fin et le prix sera réparti par le notaire entre usufruitier et nu-propriétaire soit selon le barème fiscal de l’article Lp 264 du Code des impôts de Nouvelle-Calédonie soit en fonction d’une évaluation économique des droits démembrés (formule de calcul qui conjugue divers paramètres et qui peut aboutir à valoriser davantage l’usufruit). Ainsi si l’usufruitier est âgé de 82 ans au jour de la vente et que les vendeurs s’accordent sur une répartition selon le barème fiscal, le prix reviendra pour 20% à l’usufruitier et 80% au nu-propriétaire. L’inconvénient majeur lié à cette répartition du prix de vente est la disparition du démembrement et donc la suppression corrélative de l’intérêt fiscal lié à l’extinction naturelle de l’usufruit. 2e possibilité : remise de la totalité du prix de vente à l’usufruitier Dans cette deuxième hypothèse, il est mis en place un « quasi-usufruit », un usufruit sur une somme d’argent. Il est plus aisé de comprendre ce que recouvre un usufruit sur un bien immobilier : l’usufruitier peut habiter dans le bien ou le mettre en location et toucher les loyers. Qu’en est-il en revanche de l’usufruit portant sur des sommes d’argent ? L’argent est un bien consomptible, c’est-à-dire qu’il disparait quand il est utilisé. Si l’usufruitier dépense tout l’argent –ce qu’il a le droit de faire, puisqu’il a le droit d’en jouir- ce sont les droits du nu-propriétaire qui sont bafoués. Si en revanche on interdisait à l’usufruitier de dépenser cet argent, ce seraient ses droits à lui qui seraient bafoués. C’est pour cette raison que la loi prévoit que lorsqu’il porte sur une somme d’argent, l’usufruit devient quasi-usufruit. L’usufruitier peut alors dépenser l’argent mais à charge par lui de restituer la même somme au nu-propriétaire lors de son décès. En clair, le nu-propriétaire récupère gratuitement la somme d’argent sur la succession de l’usufruitier. On parle de créance de restitution. Si les comptes de l’usufruitier sont vides, cette créance de restitution permet aux héritiers de prélever gratuitement des biens mobiliers ou immobiliers à hauteur de la valeur de la somme d’argent. Ce quasi-usufruit est légal, a priori il s’applique automatiquement sans besoin d’établir une convention par écrit. En revanche la convention de quasi-usufruit s’avère en pratique très utile, elle permet notamment de garder en mémoire sur papier la somme sur laquelle porte le quasiusufruit. Fiscalement, elle sert à prouver que des droits de succession (ou de donation) ont déjà été payés sur cette somme par le nu-propriétaire et évite la double imposition au moment de la succession de l’usufruitier. 3e possibilité : remploi dans un nouveau bien démembré Dans cette troisième hypothèse, le démembrement perdure entre usufruitier et nu-propriétaire et est reporté sur un nouveau bien acquis en remployant les fonds issus de la vente du premier bien. La jurisprudence a sans cesse réaffirmé le caractère obligatoire d’un acte dûment enregistré pour constater ce remploi et afin de le rendre opposable au fisc. Vous l’aurez compris, quelle que soit l’option retenue par les vendeurs il est important d’anticiper, et ce au préalable dès la mise en place du démembrement, par exemple par des clauses appropriées dans la donation ou par un testament. 56 Pratique À votre service Par l’Office Notarial Calédonien
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