Construire Octobre 2020

Il réalise les aménagements intérieurs. Cuisines, salles de bains, meubles sur mesure, portes ou escaliers, le menuisier habille la maison. Il est l’un des derniers corps de métier à intervenir sur un chantier de construction. Rencontre avec Matthieu Lesprit, compagnon du devoir. CEMENUISIER qui gravit lesmarches Q uand il était enfant, Matthieu Lesprit allait avec son père choisir les arbres en forêt : « Ce chêne, ce hêtre... On les marquait, puis le bûcheron venait les couper. Ils étaient envoyés à la scierie. Puis mon père récupérait le bois scié. Il était menuisier. Chacun de ces métiers est solidaire l’un de l’autre. Nous voyons la vie du bois du début à la fin, et tout l’arbre est utilisé. » À 15 ans, il est lui aussi devenu menuisier, mais contre l’avis de son père. « “Tu vas te couper les doigts !“ me disait-il. » Papa n’a pas eu tort. Matthieu a en effet quelques cicatrices aux mains. Mais cela ne l’empêche pas de continuer son métier et surtout de l’aimer. ESCALIERS Même si, en arrivant sur le Caillou, Matthieu se trouve confronté à une difficile réalité : le bois local est quasi- ment inexploité. Il doit s’adapter et travailler avec des bois compensés, des laminés... Il se fait à l’idée, et réalise des meubles sur mesure avec ces matériaux : « Il y a des tâches qui me nourrissent, et d’autres qui me passionnent. » Mais il arrive tout de même à trouver de beaux chantiers qui lui plaisent vraiment. Ce qu’il aime véritablement, c’est bâtir un escalier. En bois brut, avec des calculs complexes. C’est bien la technicité qui incite Matthieu Lesprit à se pencher sur de tels travaux. « Si tu trébuches dans un escalier, c’est qu’il y a une erreur. Il y a une formule à respecter, la formule Blondel. Et puis un escalier, c’est un beau meuble, une pièce maîtresse dans une maison. » Sur un chantier, le menuisier est appelé après la phase gros œuvre, lorsqu’il faut réaliser les agencements intérieurs : portes, salle de bains, cuisine, escaliers, meubles sur mesure… « Nous nous adaptons à tout. Le sur-mesure, c’est ce qui fait notre force. Nous n’avons pas de limite, la seule limite, ce sont les finances des clients ! » sourit le jeune homme. UN ÉTAT D’ESPRIT Lorsqu’à 15 ans il entre chez les compagnons du devoir, il se lance dans dix ans de tour de France, et même de tour du monde avec une expérience en Nouvelle-Zélande. Le jeune Lorrain a bien voyagé avant de s’installer sur le Caillou, et d’ouvrir, il y a trois ans, sa propre patente, « Lesprit bois ». Un rappel de son nom, évidemment, mais aussi parce que pour Matthieu, le bois c’est une mentalité, un état d’esprit. D’ailleurs, durant ses années de compagnonnage, ce ne sont pas les travaux qu’il a réalisés ou les rénovations qu’on lui a confiées qui l’ont marqué, mais bien les gens qu’il a rencontrés. « La menuiserie, tu l’apprends toute ta vie, tu n’en verras jamais le bout. Il faut donc être ouvert d’esprit. Même si on pense savoir faire quelque chose, il est toujours important de regarder comment font les autres, d’observer les différentes techniques. Ce qui m’a vraiment plu dans le compagnonnage, c’est de rencontrer d’autres ouvriers. » Cette ouverture d’esprit lui permet aujourd’hui d’assurer avec 30 CONSTRUCTION Focus sur un métier Photos Stéphane Ducandas

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