Coco TV 1302
MADEMOISELLE DE JONCQUIÈRES Amour et vengeance Une riche veuve se venge de son amant en le jetant dans les bras d’une prostituée. Adaptant Diderot, Emmanuel Mouret livre un conte moral et cruel, avec Édouard Baer et Cécile de France, tous deux à contre- emploi et magnifiques. M me de La Pommeraye, une veuve séduisante et fortunée, entame une liaison avec le marquis des Arcis. Mais après un bonheur de courte durée, celui-ci se lasse d’elle. Pour se venger, l’amoureuse blessée provoque alors une idylle entre son volage amant et Mlle de Joncquières, une jeune femme pauvre dont il ignore le statut de prostituée. Revanche à double tranchant La mise en scène élégante d’Emmanuel Mouret privilégie les plans-séquences et restitue le plaisir des mots, l’élaboration de la vengeance de Mme de La Pommeraye passant par des joutes oratoires. Le cinéaste, toujours excellent dans les contes moraux, trouve dans ce récit de Diderot le matériau idéal pour illustrer les pièges de la séduction et de la manipulation mais aussi les étranges chemins qu’empruntent deux êtres pour s’aimer. La vengeance de la jeune veuve contre son amant a cela de pathétique qu’elle s’exerce finalement au détriment de deux femmes pauvres, Mlle de Joncquières et sa mère. Cela souligne moins sa cruauté que son incapacité à s’extraire du sexisme de la France du XVIII e siècle – miroir de la nôtre. Sous le raffinement et le luxe percent des sentiments violents, inféodés à l’argent et à la respectabilité. Le film bénéficie de l’interprétation magnifique de Cécile de France et d’Édouard Baer, tous deux convaincants dans des rôles à contre-emploi. Jeudi 11 février, à 2055, sur Arte. IL L’A DIT « Ce qui est intéressant quand la parole est abondante, c’est qu’elle est porteuse de complexité, de contradiction. Les enjeux dramatiques passent aussi par la parole, aussi bien la séduction, le mensonge, la stratégie que la retenue. Elle donne envie au spectateur de se rapprocher du visage et des yeux du personnage qui parle pour confronter ses dires à ce qu’il ressent. Si tout était dit et montré chaque fois, ce serait un peu ennuyeux. Tout ne doit pas être tout le temps donné sur un plateau au spectateur, il faut aussi qu’il cherche à démasquer ce que les personnages ressentent profondément. J’aime aussi beaucoup les plans-séquence sparce qu’on a ce plaisir du jeu, on est quasiment en direct de la réplique et de la relation qui se noue, d’où cette idée de circulation dans l’espace, de hors champs, de près, de loin, de dos. » Emmanuel Mouret, réalisateur. COULISSES 7
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