L'homme - Juin 2021

6 Ê tre un homme, c’est difficile. Ce qui ne veut pas dire qu’être une femme soit nécessairement plus facile, mais la question ici, pour commencer, est « un homme, c’est quoi ? ». « L’identité masculine, c’est la bite ! », s’exclame le Dr RonaldVirag avec la cer titude de sa profession.Virag est un andrologue français assez connu, notamment pour sa par ticipation aux recherches ayant donné jour au petit losange bleu anagramme de son nom, le Viagra. Aujourd’hui, il se concentre plutôt sur les implants péniens, qu’il pratique pour pallier les problèmes érectiles graves – ou augmenter la taille des membres jugés inadéquats. En trente ans, il a suivi pas moins de quinze mille patients. Abondamment décoré de sculptures phalliques, petites et grandes, en ivoire ou en ébène, son cabinet s’apparente à un musée de l’érotisme masculin. « Celle-ci vient du Bénin : au moment où le garçon devient pubère on la plante devant sa case pour appeler la fertilité. Allez-y, touchez-la, n’ayez pas peur ! » Pour Virag, donc, le pénis c’est l’homme, et inversement. « Je reçois des patients au bord du suicide parce que l’on s’est moqué d’eux dans les vestiaires ou à cause du commentaire imprudent d’une femme au lit. » S’ensuit le croquis d’une intervention chirurgicale type : « On déshabille la verge, on fend l’albugine dans le sens de la longueur et l’on fixe un patch veineux prélevé sur la cuisse ». Puis on recoud le tout. J’en frissonne. Entre ses mains le sexe du patient aura gagné en circonférence. « Mieux vaut l’avoir grosse que longue », soutient le chirurgien. Il me raconte le cas d’un jeune homme de 22 ans, venu consulter « avec sa mère ». Le garçon était déprimé, il l’a opéré. « Tout n’est pas résolu pour lui, mais le mec est content. » Vraiment ? Être un homme, c’est renoncer Cette question de ce qui « fait » l’homme, Belinda Cannone l’explore en creux dans le cour t essai qu’elle consacre à la « nature » des femmes, La Tentation de Pénélope. « La biologie nous confirme ce qu’affirmait Simone de Beauvoir, qu’en matière de comportement on ne naît pas femme, on le devient. Si l’on devient femme, c’est que l’humain est un animal social et que la féminité est, comme la masculinité, une construction sociale. Notamment. Parce qu’il est nécessaire de parler aussi de la psyché, et de l’inconscient ». Quand je vois mes fils se bagarrer, ils ne le font pas à la manière des filles. Pour tant, à 7 et 9 ans ils por tent les cheveux longs (trop : motif du divorce !) et je n’ai rien trouvé à redire lorsque l’aîné a demandé un aspirateur-jouet pour Noël (sinon que le truc ne l’intéresse déjà plus et qu’il accumule la poussière…). Sérieusement – mais tout cela est très sérieux, il y a des types qui se flinguent pour cela –, quand la belle Belinda écrit, dans Libé : « Une femme peut jouir simplement au contact du corps aimé, sans caresses ni gestes », je réponds : oui, un homme aussi, mais cela s’appelle l’éjaculation précoce. Des types qui se flinguent, Pavese en est un. Il a écrit Le Métier de vivre, il aurait pu l’appeler « le métier d’être un homme ». J’ai un ami, son La masculinité est une construction sociale PSYCHO HOMME

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